► La passion d'Aveleen est la photographie. Elle reçut son premier appareil photo pour ses douze ans, et depuis, ne l'a jamais quitté. Elle adore prendre des photos - que ce soit des paysages ou des portraits. Pour elle, chaque instant de la vie mérite d'être immortalisé. Ainsi, ne vous étonnez pas d'être pris en photo si vous vous mettez à lui faire la conversation. Aveleen aime se rappeler de chaque endroit où elle s'est rendue, et de chaque personne qu'elle a rencontré. Cette obsession des souvenirs est peut-être dû au souvenir de sa grand-mère maternelle, atteinte d'alzheimer depuis dix ans maintenant. Aveleen est effrayée à l'idée de subir le même sort, et pense que ce genre de souvenirs l'aideront à toujours garder la mémoire.

► Aveleen est devenue enseignante, car elle adore passer du temps avec les enfants, mais - étrangement - elle ne souhaite pas en avoir elle-même. Du moins, cette idée ne lui a pas encore traversé l'esprit. Elle préfère prendre son temps et profiter de sa jeunesse. Et surtout, elle ne croit pas en l'amour - il serait donc difficile de trouver quelqu'un avec qui faire des enfants. Aveleen aime sa liberté et n'est pas encore prête à l'abandonner pour un homme ou des enfants.

► Aveleen est venue à Vancouver, accompagnée de sa meilleure amie. Leur départ est prévu depuis quelques mois mais depuis quelques temps, Aveleen ne se sent plus à l'aise avec son amie. Abigail ne comprend pas la raison de cette distance. La vérité est qu'Aveleen a aperçu le petit-ami de sa meilleure ami, Juan, dans les bras d'une autre fille. Aveleen aimerait dire la vérité à Abigail, qu'elle considère comme sa sœur, mais elle a trop peur de la blesser. Surtout, Juan lui a fait promettre de ne rien dire et avait lui-même juré qu'il ne recommencerait pas. Mais Aveleen se sent de plus en plus coupable de mentir à son amie; de plus, elle vient d'apprendre que les deux amoureux viennent de se fiancer. Le voyage pourrait être un bon moyen de lui parler de l'aventure de Juan, mai Aveleen hésite encore.

► Aveleen adore voyager. Si elle en avait les moyens, elle ferait le tour du monde. Malheureusement, les transports restent très chers de nos jours et elle n'a pas toujours la possibilité de se rendre où elle rêverait d'aller. Ce voyage à Vancouver est donc une opportunité extraordinaire, pour elle. Elle a enfin l'occasion de découvrir une nouvelle culture, de nouveaux paysages, de nouvelles personnes sans pour autant débourser trop d'argent. Le bonheur !

► Aveleen est très ambitieuse et n'hésite pas à mettre tous les moyens en oeuvre pour arriver à ses fins. Peu importe si quelqu'un se met en travers de son chemin, elle le défiera jusqu'à obtenir ce qu'elle désire. Elle n'a peur de rien et surtout pas du jugement des autres. Peu lui importe ce que l'on pense d'elle.

► En bref, Aveleen adore l'odeur de la mer. Elle se ronge les ongles lorsqu'elle est nerveuse. Elle adore danser, sur tout type de musique. Elle ne montre pas ses émotions et s'attache très rarement. Elle est pleine de vie et rieuse mais a un caractère fort. Elle a la phobie des araignées. Elle adore les films d'horreurs, déteste les romances.

L’amour, je n’y crois pas. D’ailleurs, aucune personne sensée et raisonnable n’y croirait. Bon, d’accord, ma meilleure amie – qui est l’une des personnes les plus intelligentes que je connaisse – est certaine que l’amour est cette chose pour laquelle chacun de nous est né, notre but final. En tout cas, pas pour moi. Toutes ces niaiseries, ces mièvreries, ces preuves d’amour à l’eau-de-rose me donne envie de vomir. C’est simple, je n’ai jamais éprouvé le désir, ni le besoin, d’aimer et je suis certaine que je ne l’éprouverais jamais. L’amour n’a fait que détruire les gens. Et c’est là, le but de l’amour. Vous détruire.

« Plaisir d'amour ne dure qu'un instant, chagrin d'amour dure toute une vie. »

« Tu as gâché ma vie ! Tu m’entends ? Regarde ce que je suis devenue à cause de toi ! »
« Ne m’accuse pas de ta déchéance personnelle, je t’en prie. Tu es la seule qui a causé ce changement, je n’en suis nullement responsable. Je n’y peux rien si tu n’es capable de ne rien faire. »
« Je te hais ! »

Les cris m’empêchent de me concentrer sur mon exercice de mathématiques. Je soupire. Bien que ma porte soit fermée à clé, j’entends encore clairement leur conversation – enfin, leur dispute. Les disputes étaient mon lot quotidien, ce à quoi j’avais le droit tous les jours en rentrant de l’école. Cette ambiance n’était pas propice au travail et ce ne fut pas étonnant que je redoublai cette année scolaire. Je jetai un coup d’œil vers ma petite sœur, recroquevillée au bout de mon lit, serrant son vieil ours en peluche contre elle. Elle était beaucoup plus jeune que moi – nous avions sept ans d’écart – et elle souffrait beaucoup des disputes quotidiennes. Elle n’était qu’une enfant, et vivait encore dans le monde des contes de fées où l’histoire s’arrête avant que les vrais ennuis commencent. Dans son monde, les couples restent heureux et ont beaucoup d’enfants. Dans le notre, ils avaient des enfants – certes, mais finissaient par se détruire mutuellement. Je me levai et me dirigeai vers le lit, je m’assis aux côtés de Loreen et caressai tendrement ses cheveux. Doucement, je me mis à chanter l’une de ces berceuses, que notre mère avait l’habitude de nous chantonner pour que nous nous endormions. J’avais pris la relève de cette routine car nos parents semblaient trop préoccupés à se déchirer pour s’occuper de leurs enfants.
Lorsque nos parents nous apprirent leur intention de divorcer un an plus tard, je me sentis soulagée. Enfin, les disputes allaient cesser. Enfin, je ne vivrais plus dans la crainte de rentrer chez moi et de trouver ma mère en pleurs et mon père en train de lui hurler dessus. Je m’étais, à ce moment là, déjà promis que jamais, je ne laisserais quelqu’un me traiter ainsi, même si cela signifiait renoncer au mariage de princesse dont j’avais toujours rêvé. La routine se mit en place peu à peu. Une semaine chez papa, une semaine chez maman. C’était toujours plus difficile pour Loreen qui, lorsqu’elle était chez notre mère, voulait voir son père et lorsque nous étions chez papa, voulait retourner chez maman. Mais elle s’y habitua, finalement. Elle prit ses habitudes et avait trouvé sa place au milieu de ses nombreux amis dont les parents étaient également séparés. Quant à moi, je ne pris jamais réellement le temps de réfléchir à cette situation. Je pense qu’au fond de moi, j’ai toujours préféré rejeter les sentiments qui me venaient en songeant au divorce parental. Je préférais penser que la situation était mieux telle qu’elle était aujourd’hui, et ravalais les larmes qui me venaient en songeant à la famille que l’on avait un jour été. Je gardais cette promesse, enfouie au fond de moi, de ne jamais faire souffrir mes enfants comme l’avaient fait nos parents. J’avais déjà compris que l’amour rendait égoïste, et à quinze ans, je perdis ma virginité avec un étranger, fuyant les sentiments que je m’étais interdits.

« We tell lies when we are afraid... afraid of what we don't know, afraid of what others will think, afraid of what will be found out about us. But every time we tell a lie, the thing that we fear grows stronger. »

Ma vie à partir de là ne ressembla pas guère à celle d’une adolescente modèle. Certes, j’étais très présente à la maison, m’occupant de ma petite sœur dont j’étais très proche. Mais, en dehors, c’était une autre histoire. Je sortais énormément, dans des soirées organisées par les plus gros fêtards de la ville où circulaient alcool, cigarettes et autres drogues illicites, auxquels je m’adonnais parfois. Je finissais souvent la nuit dans le lit d’un jeune garçon, ou même des hommes – bien que cela fusse plus rare. Ma meilleure amie désapprouvait mon comportement, mais je ne me jugeais pas. Elle me comprenait, sachant l’enfer que j’avais vécu chez moi. Elle avait connu la même chose, mais contrairement à moi, elle n’avait jamais cru que l’amour était la cause de ce déchirement. Elle pensait simplement que ses parents n’étaient pas des âmes sœurs, et elle ne démordait pas à l’idée qu’un jour, elle-même finirait par trouver cette âme sœur. C’est une romantique inconditionnelle, et je crois que c’est l’une des choses que j’aime chez elle.
Abigail et moi avons grandi ensemble. Nous étions voisines (jusqu’au divorce de mes parents) et avions l’habitude de jouer dans nos jardins respectifs ensemble. J’avais toujours adoré ses longs cheveux bruns, et son regard noir, qui lui donnait un air froid – ce qu’elle n’était pas du tout. Mais j’aimais cette contradiction. Tout comme moi, elle n’avait pas le caractère de son physique. Nous étions tellement différentes mais, au fond, c’est ce qui nous rapprocha. Nous nous complétions, et j’adorais passer des moments avec elle – surtout lorsque nous marchions main dans la main à travers les champs de blés. Elle était comme ma seconde sœur, ma confidente – celle à qui je racontais tout. Elle savait tout de ma vie. Je savais tout de la sienne. J’étais là quand elle tomba amoureuse de Juan. Il était charmant, drôle et attentif. L’homme parfait. Pour elle, du moins. Ils avaient dix-huit ans et déjà au bout de deux mois, Abi entrait en courant dans ma chambre et en hurlant qu’il était celui qu’elle épouserait. Son enthousiasme m’avait toujours fait rire, bien que je ne puisse pas m’empêcher de m’inquiéter pour elle. Mais nos visions de l’amour étaient si différentes que je ne pouvais comprendre son engouement pour son petit-ami. Pendant qu’elle vivait l’amour parfait, je passais de bras en bras, découvrant la puissance d’un corps masculin contre le mien.
Lorsque j’appris avoir gagné au concours, Abigail fut la première personne que j’appelai – pour lui proposer de m’accompagner. Nous étions déjà partis auparavant ensemble en vacances – quelquefois à deux, parfois accompagnées de Juan et de ma petite sœur. Elle avait accepté, bien sûr et j’avais attendu le jour du départ avec impatience jusqu’à ce qu’une découverte vint me perturber.
Comme tous les matins, je sortis de mon appartement pour aller acheter une baguette à la boulangerie du quartier. Rien ne présageai l’horreur qu’allais me procurer cette vision … En tournant au coin de ma rue, j’aperçus un couple s’embrassant à pleine bouche. Rien d’anormal, bien que des déclarations aussi intenses en pleine rue me donnent toujours envie de vomir. Mais quelle ne fut pas ma surprise quand l’homme, se détachant de la jeune femme, se révéla être Juan. J’ouvris la bouche, choquée. Certes, Abigail et lui étaient maintenant ensemble depuis plus de six ans (et je savais que certains hommes avaient tendance à aller voir ailleurs au bout d’un moment), mais ce n’était pas une raison. Personne n’avait le droit d’infliger ça à ma meilleure amie. Serrant mon porte monnaie dans ma main, je m’élançai vers lui, qui souriait niaisement à la grande femme blonde. « Qu’est-ce que tu fous ? » grognai-je en arrivant à sa hauteur. Juan se retourna vers moi et en m’apercevant, ouvrit de grands yeux ronds avant de rougir et de bafouiller je-ne-sais-quelles-excuses que j’entendais à peine. Je me mis à hurler dans la rue, pouvant passer pour une folle, laissant Juan penaud devant moi. Je pouvais certainement passée pour la femme trompée, venant de surprendre son fiancé dans les bras d’une autre. J’étais comme ça, je m’étais toujours sentie responsable des gens que j’aimais, et je savais que je les protègerais toujours contre n’importe quoi. Il finit par me promettre d’arrêter cette relation si je ne disais rien à Abigail. Bêtement, j’acceptai avant de jeter un regard féroce à l’autre garce qui s’empressa de baisser les yeux.

Aujourd’hui, je regrette avoir fait cette promesse – car je ne suis pas du genre à en briser une. Mais je sais qu’il va falloir que je finisse par l’avouer à Abigail. Je ne peux pas supporter l’idée que, dès que nous sommes ensemble, son « amoureux » est peut-être dans les bras d’une autre femme. Le voyage est sûrement une bonne occasion, mais j’ai peur de la blesser. Telle que je la connais, elle sera effondrée et je déteste la voir ainsi. Mais il ne me semble pas avoir un choix : son avenir est en jeu et je ne la laisserais certainement pas épouser un idiot tel que Juan.